Michael Smith vit de façon monotone et ritualisée à outrance (il fait l’amour tous les mardis, prend son bain quotidiennement à heure précise…). Sa vie bascule quand il rencontre dans la vraie vie les personnages de son comics préféré Enigma. Michael devient plus entreprenant et se met à mener l’enquête pour comprendre d’où viennent ces personnages mais aussi quels sont leurs buts. Pour cela, il s’associe à l’auteur des trois numéros d’Enigma publiés dans son enfance, Titus Bird.

Urban Comics publie ici Enigma, récit de 1993, en français. On ne peut rester indifférent à cet album et à ses personnages dépravés et peu attachants. Ici, tout le monde est un anti héros en puissance. Et tout commence avec une description âpre et cynique expliquant en voix off le point d’achoppement de ce récit mi fantastique mi philosophique. D’ailleurs cette narration particulière va nous accompagner dans toute la lecture d’ Enigma. La voix-off apostrophe le lecteur, se moque des protagonistes de l’aventure et ironise sur l’incongruité des situations.

Le dessin nerveux et torturé de Duncan Fegredo explore la névrose (et même probable psychose) du personnage principal. Les visions de cet esprit dérangé sont particulièrement soulignées par les couleurs employées. Les cases contrastent avec la majestuosité des illustrations de couvertures.

La question perpétuelle que le lecteur est amené à se poser consiste à savoir si on se trouve dans la réalité ou dans un monde sublimé par l’esprit torturé de Michael Smith. Le fait d’introduire Titus Bird, auteur du comics au centre de l’histoire, permet de questionner le lecteur sur le processus de création. Quand la création échappe-t-elle à son auteur ? Nous avons donc une mise en abîme intéressante de Peter Miligan sur le travail de scénariste.