Noé est un homme vigoureux et tonique en pleine force de l’âge, doté d’une femme et de trois enfants. Il représente le « bien » face aux dérives de violence et de cruauté envers la Nature dont font preuve la plupart des autres hommes. Dieu le choisit donc pour construire une Arche qui sauvera les animaux du Déluge qui aura lieu pour exterminer les hommes et leurs vices. Noé ne peut se résoudre à une telle fin de l’Humanité et tente de raisonner ses compatriotes. Vainement. Ses visions continuant plus que jamais et la demande divine devenant de plus en plus pressante, il se décide à obéir.

Avant de réaliser le film du même nom (sortie française le 9 avril 2014), Darren Aronofsky et son co scénariste Ari Hendel, nous proposent une fable écologique mettant en scène le fameux Noé.
Il est intéressant de le présenter comme un homme avec ses colères, ses doutes et son sentiment (parfois hyper exacerbé) de justice. Les scénaristes choisissent également de nous montrer un quarantenaire puissant et dynamique et non l’habituel patriarche décrit dans les textes religieux.
En outre, ce côté défenseur des animaux, son obsession d’obéir aux instructions divines jusqu’à en devenir un personnage parfois injuste le rendent ainsi profondément humain.
Les auteurs interprètent les textes à leur manière, magnifiant la relation de Noé avec ses enfants, ou transformant la « malédiction de Cham » en célibat imposé par son père. L’épisode de l’ivresse de Noé apparaissant bel et bien mais d’une façon assez différente de la version habituellement relatée. Ainsi les auteurs donnent une dynamique et une modernité saisissantes à cette histoire millénaire.
La licorne ne manque pas son rendez vous, ou plutôt n’apparaît pas… au plutôt on la symbolise sous les traits d’un reptile qui se retrouve solitaire sur l’Arche suite à un accident qui tue son partenaire.

Au niveau du dessin, les pleines pages de bataille et de déluge sont impressionnantes. Les cases sont traitées avec des plans très cinématographiques, dans un mouvement relativement vertigineux. Rien d’étonnant à ce qu’une adaptation sur grand écran voit finalement le jour ! Les décors de type post apocalyptiques frappent par leur dépouillement et par le contraste d’avec les premiers plans jonchés de ruines ou/et de cadavres. Les scènes de montée des eaux sont parfaitement maîtrisées ce qui ne représente pas une mince affaire. On aime beaucoup cette Arche massive, brute qui ne ressemble pas du tout à un bateau. Les animaux ne sont pas immédiatement reconnaissables car le dessinateur leur donne une forme propre à lui dans les détails. Cela renforce l’aspect SF de l’ensemble car on a parfois l’impression que les espèces montrées sont des créatures d’un autre monde.

A noter que les éditions du Lombard proposent à la fois la publication des 4 tomes de Noé sous forme d’intégrale et la parution à l’unité des tomes 3 et 4 pour ceux qui souhaiteraient compléter leur collection, tout cela en amont de la sortie du film.

Noé est donc une œuvre personnelle, une vision SF d’un monde ravagé par les guerres humaines et d’une planète qui étouffe à cause des erreurs humaines. S’appuyant sur un personnage religieux bien connu, les scénaristes lui créent un monde sur mesure selon leurs codes particuliers et réinterprètent sa vie à leur façon. Un dessin dynamique et stylé donne beaucoup de rythme à l’ensemble. Ce qui en fait une très bonne série fantastique tant sur le fond que sur la forme.