Dans le Mississippi des années 60, la routine mène la vie de Old Pa Anderson. Mais pas n’importe quelle routine. Celle d’un vieil homme noir qui a toujours dû subir la violence des blancs qui ne l’acceptaient pas. Celle d’un grand-père dont la petite-fille a un jour subitement disparu sans qu’on sache comment ni pourquoi.
Alors, lorsqu’un événement funeste lui confirme qu’il n’a plus rien à perdre, Old Pa brise enfin les chaînes et part en quête de la vérité. Quelle qu’elle soit. Quelles qu’en soient les conséquences.

Hermann, récent grand prix d’Angoulême au Fibd 2016, l’explique bien : les histoires qu’il raconte seul ou avec son fils ne sont pas les mêmes. Ici, on retrouve l’engagement d’Yves H. et sa volonté de dénoncer racisme et injustice. Tout cela magnifiquement mis en images par le maître du mouvement qu’est Hermann.
Old Pa Anderson est un polar, un vrai. Glauque avec des relents de marais ou de rivière rance comme on peut le voir dans la première saison de True Detective. On est dans l’Amérique profonde, attachée à des racines trop récentes et d’une intolérance viscérale. Les hommes y sont frustres, aigris et forment des clans qui enchaînent les actions douteuses. Mais chacun se justifie grâce à l’autre pour que finalement même le crime devienne banal.

On retrouve le trait caractéristique d’Hermann. Il transcende les paysages. Avec lui, même une station service ou un drugstore paraissent presque glamour, ou en tout cas éveillent la nostalgie. Je suis un peu plus réservée sur les représentations toujours tortueuses des personnages qui sont la patte de l’artiste. Mais vu les nombreux vices dont ils souffrent et les mauvaises actions qu’ils commettent, ces figures boursouflées et biscornues rendent bien le caractère qu’elles symbolisent.

Apre et désespérant, Old Pa Anderson nous rappelle cette terrible histoire américaine et la souffrance subie par des millions d’êtres innocents. Ce thriller se veut presque porteur d’un devoir de mémoire. Et grâce à de telles œuvres, il faut espérer que les lecteurs continueront d’avancer. Dans le bon sens !


Tiphaine