Spirou refuse de céder aux pressions éditoriales pro mondialisme de son employeur le journal Le Moustique. Viré, il décide de se recentrer sur lui et de prendre un peu de bon temps. Mais Fauvette, la fille de son ami Noé, le dresseur du cirque mondo, débarque sans crier gare (et sans sa valise). Il s’agit d’une ado furieuse, en révolte contre le monde entier, qui ne veut pas entendre parler de son père mais plutôt retourner le plus vite possible au Québec, au chevet de sa grand-mère malade. Notre groom favori héberge donc quelques jours la jeune fille afin de dénouer les tensions.
Parallèlement, un mystérieux artiste peintre fait le buzz avec un nouveau genre, qualifié par les spécialistes de « zooïsme ». Tandis que Champignac et ses amis scientifiques s’inquiètent de la prolifération d’un étrange champignon noir.

Le Spirou de… Frank Pé est sans conteste reconnaissable. D’abord avec cette nouvelle tendance artistique, le « Zooïsme » qui lui va si bien ! On profite donc de splendides représentations animalières en tous genres. Mais c’est surtout l’interprétation graphique des personnages qui nous a intéressés. En effet, ils sont sans aucun doute emprunts du superbe style de Frank Pé tout en conservant leurs spécificités originelles. Ils sont sans doute parmi les plus différents que j’ai pu voir dans les mondes de Spirou et pourtant ils sonnent bien plus justes que ceux qui tentent de se rapprocher plus du style de Franquin (celui que je préfère parmi les papa du groom). Et puis, évidemment, on a droit à un Spip avec un premier rôle et une allure magnifique.

Le scénario est lui aussi magistral. Il reprend les préoccupations scientifico écologiques de Champignac, les frictions journalistiques, le vent d’aventure un poil SF et un soupçon de mystère à résoudre. Bien sûr, on s’attarde sur les personnages et leurs relations sinon ce ne serait pas un « Spirou » digne de ce nom. En plus, l’histoire s’ancre dans une Belgique traditionnelle qui a du mal avec la modernité (voir l’allure de l’Atomium). Mais surtout, on retrouve de délicieuses touches d’humour (réflexions de Fauvette, batailles de chiffonniers des amateurs d’art avec des insultes dignes du Capitaine Haddock). Il s’agit donc du plus moderne des albums rétro consacrés à Spirou. Avec toutes sortes d’hommages aux grands de la BD Franco Belge passés (cases, astuces scénaristiques, dialogues…) ou plus récents (couvertures des albums lus par Fauvette par exemple).

Cet album est vraiment formidable. Sans doute un des meilleurs de ce dernier trimestre 2016.

Tiphaine