Dans l’antre de la pénitenceAnnée de sortie : 2017

Auteur : TOMASI Peter J./BERTRAM Ian
Editeur : Glénat



Roman Graphique
Hors Collection Glénat
Album cartonné/192 pages couleurs
Date de parution : 25/10/2017
ISBN : 9782344023648

L’histoire de la famille Winchester est bien étrange en ce qui concerne la construction perpétuelle de leur maison. Basée sur des faits réels, cette aventure hors du commun va vous marquer, pour ne pas dire vous hanter.
Tout commence avec la mort de l’époux et de la fille de Sara Winchester. Cette dernière a un comportement et des visions qui inquiètent sa famille, qui vit loin de sa demeure.
Cette maison est devenue un immense chantier. Le choix de Sara : construire, encore et toujours, en continue. Une seule chose l’obsède, entendre le son des marteaux qui s’occupent d’un mur, un escalier, un parquet, une fenêtre… faire, défaire et refaire…
Pour ce qui est de la main d’œuvre, Sara n’est pas très exigeante. Elle choisit ses employés d’un coup d’œil, ne veut rien savoir de leur vie passée, ne leur offre aucun salaire, mais le gîte et le couvert.
Qui accepterait un tel traitement ? D’anciens criminels qui utilisent ses journées de labeur harassantes comme un exutoire.

Il est délicat de garder son esprit clair quand on vit dans une telle maison où les extensions poussent ou sont défaites selon le bon vouloir de la maîtresse des lieux. Aucune cohérence, à l’image du capharnaüm qui règne dans l’esprit de Sara Winchester. Un escalier qui ne mène nulle part, une porte vers le vide etc. Peu importe l’esthétique, l’utilité, seule compte l’occupation perpétuelle et le bruit qu’elle procure.
Cette routine chaotique, va être émaillée d’événements perturbateurs, comme la venue de membres de la famille de Sara et de son défunt mari, qui s’inquiètent tous de sa santé mentale, mais aussi par l’arrivée d’un nouvel ouvrier qui a lui aussi beaucoup de choses à oublier.

Le scénario de Peter J Tomasi est très soigné. Vous ferez tout de suite partie de l’équipe. Vous comprendrez quelle est la place de chacun. Tout est clair dans ce bazard.
Les personnages ont une épaisseur, un background qui saute aux yeux. Pas besoin de longs flashes back pour tout comprendre. Les informations qui nous éclairent sur les choix qui sont réalisés par Sara Winchester sont données avec subtilité, en temps voulu pour que rien de casse le rythme.
Les tempéraments sont bien trempés, les confrontations sont rugueuses. Tout se fait à la force du poignet, que ce soit la direction des hommes, comme le développement de la maison.

Une atmosphère très lourde règne de bout en bout ce qui est un vrai plaisir.

Le dessin très nerveux de Ian Bertram, que vous pouvez apprécier au maximum avec l’édition collector en noir et blanc. Tous ces petits traits qui ont un effet très curieux, qui accentuent l’ambiance irréelle et oppressante de l’œuvre. Le dessin n’est pas d’un réalisme fou, mais il y a une telle intensité dans son style. Si vous prenez des cases comme celle où Sara et Monsieur Murcer s’occupent du parquet, la première rencontre entre Sara Winchester et Warren Peck ou dans le 4ème chapitre, quand Peck regarde par un hublot avec 2 autres ouvriers.
Il y a quelque chose d’assez unique dans ce mélange de naïveté par moment, comme dans la représentation de la sœur de Sara.
Et dans le même temps l’angoisse est partout, avec ces longues formes rouges omniprésentes qui s’enroulent telles un démon constrictor, autour de toute chose, de toute personne.

Dans l’antre de la pénitence est une œuvre admirable, curieuse et magnifique qui donne ses lettres de noblesse au 9ème art.

Xavier