A l’origine, quête initiatique médiévale présentée sous la forme de trois albums format classique en couleurs, « Messire Guillaume » se refait une jeunesse avec cette intégrale intitulée « L’esprit perdu ». Cette fois, l’œuvre se décline en un one-shot à l’italienne, tout en noir et blanc, agrémenté de dessins inédits.

Si la qualité de la série n’était plus à prouver ni au niveau narratif ni au niveau graphique, cette nouvelle version se révèle carrément bluffante par sa mise en page et le traitement magnifique de ces planches en noir et blanc. Les ombres sont particulièrement bien maîtrisées et font énormément ressortir les expressions des visages et le détail des décors, tant architecturaux (châteaux) que naturels (forêt).

L’histoire nous raconte la quête du jeune Guillaume, endeuillé par le récent décès de son père. Il va chercher à gérer cette perte en se mettant en marche et en traversant ainsi symboliquement son adolescence, croisant sur son chemin des êtres aussi effrayants que malfaisants et devant peu à peu renoncer à sa naïveté enfantine.

Cette façon inédite de présenter l’histoire augmente encore l’aspect étrange, parfois terrifiant, des créatures fantastiques rencontrées et l’intensité des situations dramatiques (conflits entre personnages, mensonges, combats…). Le conte prend ici une autre dimension, bien plus fantasmagorique et l’impact sur notre lecture se révèle encore plus important. On vit le combat incessant de Guillaume, qui passe du rêve au réel sans rien maîtriser, comme oscillant entre son enfance et sa future vie d’adulte. Quasiment victime d’un complexe de Peter Pan, notre jeune héros va néanmoins passer toutes les épreuves imposées par ses songes afin de trouver la voie de la vérité (et celle du grandissement).

Un album véritablement insolite de part son format et son propos. Une très belle histoire qui tient du conte fantastique tout autant que du récit quasi psychanalytique. Une quête à vivre absolument.