Salle : Bibliothèque Municipale
Ville : Tours (37)

Serial Philo, saison 4, N°2 : Stranger Things, Un conte cruel ?
Bibliothèque Municipale de Tours, jeudi 1er décembre 2016

Attention spoilers évidents ! Réservé à ceux qui ont déjà visionné la série ou ne souhaite pas la découvrir seuls.



C'est devant une soixantaine de personnes que David Lebreton, professeur de lycée, anime le Serial Philo n°2 de cette saison 4 consacré à la série qui a fait le buzz l’été dernier, à savoir Stranger Things.
Les prochains épisodes de Serial Philo, seront consacrés à un parallèle Game of Thrones et les complots développés par Shakespeare pour le premier. Puis une association entre Downton Abbey et La princesse de Clèves.

Dans un premier temps, il convient de résumer la série Stranger Things.

On pourrait tout d’abord qualifier la série de polar. Avec l’enquête des quatre enfants pour rechercher Will. Mais en fait deux autres enquêtes se déroulent dans la première saison. Une « officielle », menée par les adultes, dont un sheriff. Puis, une faite par deux ados.
Trois angles d’enquêtes donc qui permettent de développer différents genres.
Celle des enfants se rapproche des aventures.
Celle des Ados se réfère aux films d horreur.
Celle des adultes joue sur les codes fantastiques mais avec dimension en plus, une étude sociale de ses personnages.



Les références aux films des années 80 sont évoquées de différentes manières.



D’abord une sorte d’atmosphère qui plane sur la série. Ensuite les images directement utilisées pour évoquer une œuvre déjà connue (Le prof de science regarde The thing, l'affiche est aussi dans la salle de jeu de Will...). Enfin, les dialogues fournissent parfois des évocations directes (ex : Joyce propose à son fils Will d’aller voir Poltergeist).
Ci-dessous une vidéo qui a été présentée lors de la conférence et qui fait des parallèles entre les plans de Stranger Things et de nombreux films.



Point marquant : référence au slasher. Voir Véra dicka : une bande d'ado, qui a commis une faute, un tueur (masque, fou) qui est au courant de la faute et les tuent pour ça, et une fille qui reste jusqu'à la fin.
Cf : Scream.
Voir l'épisode 2 de Stranger Things avec Nancy qui est invitée à une soirée avec son petit ami. Elle boit et perd sa virginité. Cela veut dire qu'elle est condamnée à mort selon les codes du slasher. Mais il se passe autre chose dans Stranger Things.
Hypothèse : Barbara et Nancy seraient la même personne. Avec plusieurs personnalités. Une sorte de passage à l'âge adulte avec la mort de l'enfance.
Cela pourrait se poser aussi pour les 4 enfants.

C'est ainsi que l'on peut rattacher Stranger Things au genre littéraire du conte.
Cf : Vladimir Propp "morphologie du conte" : 4 thèses fondamentales
Les éléments constants sont la fonction du personnage. Le nombre de fonctions est limité max 31. La succession des fonctions est toujours identique
Tous les contes de type folklorique appartiennent au même type en ce qui concerne leur structure.
Stranger Things rentre dans cette logique. Il y a bien sûr des mises à jour contemporaines (cf : références cinématographiques du début de la conférence). Le shérif représenterait par exemple le roi fatigué. Le prof de science serait le magicien...
Le faux héros : le père de Will qui n'essaye que de voir si il peut gagner de l'argent avec la disparition de Will avec des dommages intérêts.

Cela pourrait se rapprocher de Peter Pan et du Petit Prince, avec comme point commun l'enfance.
Pour Peter Pan : Wendy est le personnages central. Elle découvre ce qui vaut le coup de devenir grand : avoir de vrais sentiments. Alors que Peter Pan batifole avec clochette, Lily la tigresse, les sirènes...
Même chose pour le Petit Prince, car il fuit sa rose. Il grandit, jusqu'à mourir. C'est toute une vie qui se déroule.
Devons nous être nostalgique de l'enfance ? Non c'est le choix de l'expérience des sentiments amoureux que de devenir adulte. Nancy comme Mike franchissent des étapes vers l'âge adulte.
De ce point de vue, Stranger Things se rapproche d'un conte philosophique.

Il y a aussi une autre raison de les rapprocher : le scepticisme envers les dogmes.
Il faut aller au-delà des structures existantes, aller vers l'extraordinaire.
« Suspension volontaire de l'incrédulité » : on accèpte d'y croire lorsque l'on entre dans un conte.
C'est philosophiquement assez riche. Cela veut dire que l'on a mis de la souplesse dans son raisonnement. Ce qui n'est jamais mauvais.

3eme point : le monstre. Ce qui représente nos peurs.
D'où il vient et qu'est ce qu'il fait ?
Scène de discussion avec la soeur de Terry. Nous sommes en pleine guerre froide, intervention du gouvernement, mouvement hippie et drogues... Conséquences sur le bébé : Eleven.
C'est à partir de Eleven qu'il y aura le monstre.
Le monstre serait la peur des américains envers le communisme. Dès qu'il y a une brèche, le monstre peut arriver dans notre réalité. Cela suit le scénario classique de la petite histoire du monstre.
Avant les monstres sont loin, si on ne va pas les voir, ça se passe bien. Puis les monstres vont se rapprocher (cf : la créature de Frankenstein). Puis il va y avoir une ressemblance : docteur petiot.
Et pour finir la part monstrueuse qui est en chacun de nous : Docteur Jekyll ou Dexter.
Dans Stranger Things, le monstre naît de nos peurs. Le sommeil de notre raison créé nos peurs (Goya).
Les enfants jouent à se faire peur dans leurs jeux de rôles. Il est incarné par le demongorgone.
Il y a le maître de jeu, celui qui en parle et qui en a peur ; et ils ne sont pas près à l'affronter épisode 1. A contrario, dans l'épisode 8, ils ont vécus. Et la ils vont bien agir. Ils ont apprivoisé leur peur.

Mais ce n'est pas fini...
On se pose la question de d'où vient le monstre. cf fin de la saison. C'est toujours nous qui les imaginons.

Si il y a quelque chose de philosophique :
Pourquoi quitter l'enfance ?
Imposer de bousculer les convictions.
Réflexion sur nos peurs et comment les surmonter.

Il reste un petit quart d’heure d’échange avec la salle. On revient notamment sur le côté aventure fantasy des enfants et la répartitions des rôles selon ces codes où Mike serait le Magicien, Eleven l’elfe…