Salle : Bibliothèque Municipale Centrale
Ville : Tours (37)



David Lebreton est l’intervenant de ce soir.


En guise d’introduction, David Lebreton annonce qu’en raison de la richesse de la série, tous les secrets ne seront pas révélés.
Il faut savoir qu’au départ, il y a eu un film en 1973 avec Yul Brynner, écrit et réalisé par Michael Crichton, puis une suite en 1976 (les rescapés du futur) et une série dans les années 80.
Pour la série qui nous intéresse ce soir, produite par HBO, il y existe à ce jour 2 saisons et une 3ème est annoncée pour 2020.

Pour ce soir, David Lebreton a limité son analyse à la première saison.
L’idée est la suivante : il n’est pas possible de faire la distinction entre humains et robots. Ces fameux robots mis dans un parc d'attraction western, sans aucune limite, sans loi, sans code moral.

Cela pose immédiatement des questions éthiques sur l'intelligence artificielle, sur le sens de la vie, sur l’essence de l'Humanité.
Vous pouvez vous reporter à ces quelques auteurs : Aristote sur la nature, Rousseau et l'Homme, le mythe de la caverne de Platon.

Une autre question se pose : la phobie du spoiler est elle justifiée ?
Cette angoisse provoque une réduction de l'oeuvre à "et après ?". Mais l'esthétique, la finesse du jeu, la qualité des dialogues ne sont ils pas des raisons de voir une série ou un film même en connaissant la fin? Sinon pourquoi revoir un film? Pourquoi aller au théâtre pour une pièce classique ?
Westworld fait partie des séries qui sont à voir, même avec la connaissance de spoilers.
Il faut même revoir la série pour tout remettre dans l'ordre. Vous allez (mieux) comprendre pourquoi avec ce qui va suivre.

Présentation des 12 personnages principaux.

Ancrage commun : la mise à jour de Robert Ford, "rêverie", c'est le début de toutes les intrigues de tous les personnages. Un bel effet domino.
Plusieurs flashes-back interviennent dans la série. Ils complexifient la narration, mais ne sont pas un problème (surtout une fois que vous avez les clés pour les détecter).
La série joue sur 2 lignes de temps avec 30 ans d'écart. Cela se retrouve dans le personnage de William
Bernard lui est un robot, c’est un vieux Arnold (l’ancien associé de Robert Ford)
Ford créait les robots avec Arnold. Dolores Abernathy est la plus aboutie des créations.
Arnold refuse que Dolores continue de subir des souffrances et veut que l'ouverture au public du Parc d’attraction qu’est Westworld ne se fasse pas. Il injecte le personnage de Wyatt dans Dolores. Mais Ford réussi malgré tout à ouvrir le parc, avec des fonds d'investisseurs.
Robert Ford est en danger professionnel, il lance le programme rêverie
William de son côté veut trouver le labyrinthe.
Dolores et Maeve veulent sortir de Westworld.
Dolores va accomplir le projet de Ford.
Maeve revient dans le jeu pour aller chercher sa fille.

Ici, on dépasse le modèle de l'Intelligence Artificielle. Avec cette opposition entre Intelligence Artificielle et Intelligence Naturelle.
IA : c’est par définition artificiel ; cf Aristote. Le monde est en 2 régions : au delà de la lune les êtres sont divins. En deçà, les êtres sont imparfaits, éphémères.
Dans la zone sub lunaire, il y l’action de la nature, l’action par nature. On est là dans l’intervention. La technique aussi provoque des changements. Un agent peut créer une mutation, par exemple le bois peut devenir un meuble.
L'art imite la nature, la technique permet de créer des choses nouvelles.
Cette théorie a des limites, comme pour la musique. C'est d’avantage dans le processus que dans le résultat qu'il faut prendre cette théorie.
La technique tente de créer de l'intelligence dans la machine : IA.
Plus les machines sont complexes, plus elles permettent de comprendre les phénomènes naturels.
Au XVIIe et au XVIIIe, a existé une passion pour les automates. Jacquet Drose : écriture, dessin et musique avec 3 automates.



Jacques de Vaucanson, avec un canard mécanique. La joueuse de piano, cadeau à Marie Antoinette en 1785.

Avec une meilleure connaissance de l'anatomie, il y eu de meilleurs automates. Et inversement.
Ford veut du réalisme. Arnold veut comprendre la création de la conscience grâce aux machines.

David Lebreton nous diffuse un extrait de la série : une échange entre Ford et Bernard. On y retrouve la théorie de l'esprit bicaméral
Ce genre de passage se retrouve dans toute la première saison. Cela donne des éléments et construit la série, mais cela rend la série bavarde, didactique et lourde. Cela explique, par nécessité, pour ne pas perdre le spectateur.

Arnold veut se passer de l'esprit bicaméral, pour créer une conscience. Remplir la boîte de la pyramide, mais comment ? C'est la recherche des épisodes 3 au 10.

Avec Maeve : comme dans l'univers conceptuel de John Locke.
Qu'est ce qui fait que je suis moi et que je me distingue des autres : conscience et mémoire.
En temps normal, les hôtes perdent leur mémoire. Mais Ford avec rêverie, donne accès à des bribes de vies antérieures.
Cela donne pour Maeve, une brèche, qui fait qu'une conscience va se créer. De plus, elle sort de veille dans le laboratoire. Comme dans La République de Platon, pour l'homme qui peut sortir de la caverne. Après il ne peut plus faire comme si il n'avait rien vu.

Dolores : Arnold a préparé l'éveil de Dolores.
Épisode 10. Dolores rencontre Bernard et le prend pour Arnold, mais Ford dit que « non c'est Bernard ».
Cela veut dire que chaque flash back se passe en réalité entre Arnold et Dolores.
Les robots sont nus, mais quand Dolores est vêtue, c'est avec Arnold. De plus c'est dans un Petit local, sous l'égide au centre du labyrinthe. Ces entretiens sont faits pour que Dolores accède à la conscience, grâce à Arnold.
David Lebreton diffuse à ce moment un extrait qui montre quand Arnold abandonne la pyramide pour le labyrinthe.

Dans les débuts du parc, Dolores vit un incident tragique. Un soir elle s'oppose à son agresseur. Quand elle en parle avec Arnold, cela donne une très vive émotion. Propos sur le deuil, ce qui fait échos à ce qu'a vécu Arnold. Dolores ne veut pas perdre ses souvenirs, même si c'est douloureux.
Elle brode à partir d'une phrase sur l'amour. C'est encore du pré écrit. Mais elle progresse vers une libre pensée.
Elle doit encore être formée pour réussir l'exercice le test du labyrinthe.

Jean Jacques Rousseau : État de nature qui révèle la vie humaine à l'État de nature.
L'amour de soi
La pitié
La perfectibilité, évolution d'un être en bien ou en mal.
Dolores progresse de la même façon. Faire arriver une conscience dans Westworld.
Dans Émile, il faut préserver les sentiments naturels pour qu'ils ne soient pas corrompus par la société.
L'amour de soi : elle se développe en confrontation avec la violence, qui se retrouve dans le parc. Confrontation avec la mort, avec la douleur.
La douleur est la base qui pousse à arrêter de souffrir.
Se protéger. Protéger sa personne. Prendre conscience de soi, de sa personne. Le personnage de Dolores a un nom prédestiné. Les personnages principaux ont tous un monologue sur la douleur.

Pitié
Dolores va chercher l'empathie chez les autres. Elle va apprendre au fur et à mesure. Elle progresse dans le labyrinthe grâce à l'empathie. Elle a du trouver d'autres vies, d'autres paysages. Elle qui est immortelle doit comprendre que les hommes peuvent mourir. Elle doit apprendre à travers ceux qu'elle rencontre pour se faire une expérience de la condition humaine.
Elle aime la nature, elle découvre la littérature avec Arnold (Alice, Shakespeare). Ainsi Arnold essaie de déclencher l'étincelle qui provoquera la création de la conscience.
La série est aussi un labyrinthe que nous parcourons avec les personnages.

La perfectibilité : les programmes s'affinent. Les hôtes sont fait pour la perfectibilité.

Ford : il crée de la distance critique. Cela dérange les évidences.
L'empathie n'était pas source de malheur. Face aux traumatismes, l'oubli est une bonne chose pour les robots. Ford est contre la création d'une conscience pour cette raison. Il devient moral de leur faire oublier leurs souffrances
Ford est contre la création de la conscience. La liberté c'est une vertu inutile. Les hommes vivent de manière automatique. Une vie intérieure ? Elle n'est qu'une supposition. En rendant les hommes plus automatiques et routiniers, cela estompe la frontière entre hôtes et humains.
Ford au début aurait accentué la différence humains - machines. Mais après il tend à dire que l'homme est comme la machine, il dit que la conscience chez l'homme n'existe pas. Ford a mûri un plan pour que les hôtes puissent s'évader, acquérir des droits. Ford est le deuxième libérateur. Il refait les mêmes choses que Arnold avec le programme rêverie.

Un troisième instituteur intervient pour Dolores, c'est Dolores elle-même. Elle a ancré une envie de liberté. Elle donne envie à Dolores de retourner au coeur du labyrinthe. Avec Arnold, Ford et Dolores.

La pensée humaine n'a t elle pu se développer que grâce à une intervention extérieure ? Intervention de la religion : fresque de Michel Ange entre Dieu et Adam.
Interprétation possible : là où est Dieu, c'est la forme d'un cerveau. Du coup l'homme ne doit rien à Dieu.
Aristote : rien de divin ni de sacré. Cela veut dire que l'un et l'autre peuvent se développer. On peut faire progresser l'intelligence humaine. Un Seuil à franchir, à explorer dans la seconde saison.

Le behaviorisme.

Sur Real Humans, ce n’est pas le même aspect sur la recherche de l’intelligence. Est-ce qu’un parallèle est possible ? Les deux séries troublent notre jugement, et nous obligent à passer au delà de "ce ne sont que des machines, ce n'est pas grave". Surtout quand on connaît la vie réelle de l’actrice Evan Rachel Wood qui interprète Dolores et ses témoignages devant le sénat américain sur les violences faites aux femmes.

Rapport à la violence, dans un ensemble plus vaste, le parc c'est la production de série TV, les hôtes sont les personnages. Question de l'éducation du spectateur. C'est au spectateur de prendre conscience de ce qui se passe et de ce qu'il est. Pour vibrer, il faut oublier que ce ne sont que des personnages. Même chose pour les invités. Il faut que la frontière soit toujours très fine pour avoir des émotions. Limite tenue entre réalité et fiction.

Henry Ford / Robert Ford ? Développent humain / automatisation des hommes.

La question est ouverte. A vous de continuer à réfléchir sur le sujet.

Prochain rendez vous le 16 janvier, avec la série « la casa de papel »