Lorsqu’un auteur annonce que son dernier roman est le meilleur qu’il ait jamais écrit, il y a de quoi avoir quelques doutes, car cette accroche se retrouve trop souvent dans la bouche des écrivains.


Cependant, pour Le jeu de l’ombre, le nouvel ouvrage de Sire Cedric, édité par Le Pré aux clercs, il faut bien reconnaître que c’est exactement le cas. Le jeu de l’ombre est un thriller qui vous emmènera aux limites de votre perception et vous fera de nouveau éprouver ce sentiment si désagréable qu’est la peur.


Vous retrouverez Vauvert, ce policier un peu lourdaud, qui possède un 6ème sens (une sorte d’intuition exacerbée) qui lui permet d’avoir des sensations bizarres et un peu plus de flair que ses collègues, mais sans qu’il s’agisse véritablement d’un atout imparable qui lui permettrait de résoudre toutes ses enquêtes. Une sorte de petit plus lui permet de ne pas stagner sur ses dossiers, mais lui attire également beaucoup de complications. Il se retrouve à enquêter sur ce qui semble être le début d’une série de meurtres de jeunes femmes. Le point commun de ces meurtres : les victimes sont emballées dans du film plastique.


En parallèle, vous ferez la connaissance de Marko Swann, une rock star, qui enchaîne les conquêtes amoureuses sans lendemain. Aimant les sensations fortes (alcool, drogues…) Marko Swann va avoir un terrible accident de voiture après un concert donné dans le sud ouest de la France : une sortie de route au pied du pont du Diable (un lieu prédestiné ?). Mais Marko va s’en sortir miraculeusement indemne. Malheureusement pour lui, cet accident va faire basculer sa vie, car il va avoir des séquelles particulièrement handicapantes : il ne peut plus entendre la musique. Attention, Marko Swann n’est pas sourd, la seule chose qu’il ne peut plus entendre ce sont les mélodies (terrible perte pour un musicien !). Commence pour lui une véritable descente aux enfers, car il ne sait plus quoi faire pour s’en sortir et réentendre de nouveau comme avant. Il va alors devoir affronter ses propres démons, ce qui l’emmènera sur un terrain des plus glissants où se confondent fantastique et folie. Car lorsqu’il s’agit de perception de notre environnement, une distorsion si infime soit elle peut avoir des conséquences infinies.


Ce récit se situe chronologiquement entre L’enfant des cimetières et De Fièvre et de Sang, les deux autres thrillers écrits par Sire Cédric et publiés aux éditions Le Pré aux clercs. Mais comme le répète l’auteur, chaque livre se tient en lui-même et peut être lu indépendamment des autres, même si une bonne connaissance de l’ensemble de ses écrits est toujours un plus.


Vous retrouvez dans Le jeu de l’ombre tout ce qui fait le charme de l’écriture de Sire Cédric, c'est-à-dire des personnages charismatique, qui ont une très importante force de caractère et en même temps, leur faiblesse ou côté obscur sont aussi développés que leurs qualités. Cet ambivalence des personnages leur permet soit d’accéder à la rédemption, soit de basculer au fond du gouffre en un rien de temps.


Multipliant les clins d’œil et autres références (le dessinateur de Lenore, Hokuto No Ken pour n’en citer que quelques unes), Sire Cédric a construit une histoire qui fait froid dans le dos. Sans vous dire exactement où se trouve ce passage, je peux tout de même vous indiquer que vers le milieu du roman, vous aurez une scène qui fait son petit effet. Sans que ce soit le climax du roman, vous comprendrez pourquoi ce texte est classé dans les « thriller ». C’est à mon sens la preuve que Sire Cédric ne cesse de progresser et de faire évoluer son écriture. Cherchant toujours à surprendre son lecteur tout en lui faisant baisser sa garde en le confrontant à un environnement connu, Sire Cédric n’en finit pas de maltraiter ses acteurs, les poussant dans leurs retranchements et leur faisant subir les expériences les plus difficiles, quel qu’en soit le prix, car aucun acte n’est gratuit. Dans ce thriller, tout n’est que calcul et manipulation. Reste à découvrir si tous ont bien compris les enjeux.


Toujours aussi sanglantes, les enquêtes de Vauvert sont passionnantes. Le voir se démener de son mieux alors qu’il n’a presqu’aucune carte en main va vous donner envie de le soutenir et de lui donner quelques pistes, d’autant que vous saurez bien avant lui ce qui se déroule vraiment (en tout cas en apparence). Par contre, pour découvrir qui est le véritable tueur et quelles sont ses motivations, il faudra que vous soyez particulièrement perspicace, voire imaginatif. Et encore, je pense très sincèrement que la fin de l’ouvrage ne manquera pas de vous surprendre, car Sire Cédric a joué sur deux tableaux cette fois. Ce qui vous permet d’avoir éventuellement deux interprétations différentes de la cause de ces événements tragiques.


Le jeu de l’ombre est un livre passionnant. Vous allez frissonner aux côtés des personnages qui seront obligés de participer à un jeu dangereux dont ils sortiront………. (à vous de le découvrir).


Vous allez aimer avoir peur.